Ci-gît
REYP ERINEUS, FILS D'
HÉRAUT DE L'AUBE PAR LA GRÂCE DE L'EMPEREUR,
MORT POUR L'EMPIRE.
( 1229 - 12 ???? )
Il y a dans toutes les lettres – E, R, I, N, E, U, S – comme un poison quelconque, une sorte de maladie de l’âme, extrêmement contagieuse, qui pourrait passer dans le sang au détour d’une méchante morsure. Le nom est à lui seul infamant, pour toujours marqué du sceau de la conjuration dont s’est rendu coupable chaque membre de sa famille, si bien que l’on s’étonne parfois qu’il continue de le porter. On l’aurait sans doute autorisé à s’en dépouiller, et laver son honneur à grandes eaux dans le fleuve du pardon impérial, mais c’est que Reyp a fait vœu de tout enterrer de sa maison avec lui ; il est – il sera – le dernier des Erineus et il refuse que cette lente mise à mort se fasse dans l'ombre. Son martyr, c’est la rédemption. Le charnier des siens exposé, c’est sa paraphe en bas d’un serment renouvelé envers son seigneur et maître.
Mais c’est tant, c’est bien trop de droiture pour une seule carcasse. L'on n’aime pas cela. L'on se fait son avis ; d’aucuns se méfient que ça n’ait trop coûté à Reyp et qu’il n’y ait dans ce cœur un sacrifice qui le condamnait dès les prémices – qui le condamnait un jour à trahir ; et les autres n’ont certainement aucune confiance dans celui qui n’a pas hésité à livrer sa chair et son sang au billot de l’empereur.