(fb) prelude to ecstasy (revka)

prelude to ecstasy

  @Revka Cervantes
☾ lupanar, terminus de la soirée
○ flashback - an 1257
tw : sexualité, prostitution, corps dénudés, langage débridé.

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Les pensées se tordent dans son crâne. Des serpents qui sifflent une lente agonie - une mélancolie qu’il n’arrive pas à digérer depuis trois mois. Pekkala est posée sur le beaupré, les plumes orangées confondues avec le soleil couchant. Le dialogue muet s’enlace entre eux. La même rengaine chaque soirée.  
- Il te faut un second. Ton deuil est passé depuis. 
- Je sais. Tais-toi 
- Ce n’est pas ta faute s'il est mort 
- N'essaye pas de démêler mes pensées 
- Je les entends 
- Va voler plus loin.
Les mots sortent de ses lèvres, ont un son, une tonalité qui effleure le grognement. Le vautour décolle de son perchoir et l’abandonne. Seul, c’est ce dont il a besoin. Seul. Molech le revoit les soirs d’orages. Quand le ciel claque ses hurlements. Que les couleurs éclaboussent l’horizon. Des vagues et des sanglots. En chute libre sans qu’il puisse le sauver. Sacrifié pour le navire. Ellébore qu’il avait choisi comme second, comme spectre. La mer n’autorise aucune pitié, aucune larmes dans ses reflets d’argent. Molech pleure chaque âme qui lui est arrachée.

Il modifie le cap sans raison, loin d’ici, près de l’ailleurs. Les jours s’empilent sur une mer d’huile. Junfark dans la mire. Tergaron comme destination. Une terre sur laquelle dansent les démons, où les vices cajolent les âmes éraflées. Un tombeau. Une capitale pour soigner les douleurs et effacer les malheurs. Un leurre à la misère. Les jours continuent, les nuits chutent dans une mécanique infernale. Le parfum du vice emplit ses nasaux. Un royaume pour celle qu’il cherche ; la reine. L'ombre de ses malheurs. Le trophée de la confusion. Le cœur grenade d'un abandon dans la moisson du temps.

« Je cherche Revka. Brune. Belle gueule. Le genre qui t’éclate les dents si tu lui fais un compliment. » Gardien du lupanar le regarde d’un œil blanc. Pas causant. « C’est le troisième bordel que je fais dans cette putain de cité, j’ai plus de patience pour les énigmes. » Se doute qu’elle est quelque part dans un de ces rades. Possiblement celui-là. Mémoire du nom mentionné la dernière fois qu’ils se sont vus. La paume pousse la porte vers l’étage. Molosse maigrelet tente de le retenir. « Vous n'pouvez pas...! » Lame sort du poignet avec une rapidité qui n’est pas celle des marins. Vieil apprentissage d'assassin refait surface. « Tu sais qui j’suis ? T’as vu les jolis galons sur mon épaule ? Tu fermes ta gueule, tu laisses passer. » Représentant de la loi sur les eaux. Ouvre les portes des chambres. Observe les alcôves. Trouve la désirée dans les bras de deux créatures enfiévrées. « J’vois que tes goûts ont baissé en qualité. » Jalousie tenaille les billes. Inspection des corps dénudés. Cabale bacchanale. « Terminez, vous gênez pas pour moi. Mais salopez pas trop les draps. J’emprunte cette piaule après. Faut qu’on cause Rev ». S’installe dans le fauteuil miteux du coin gauche. 

Le souffle est à l’agonie sur les rivages enflés. Le carmin alangui la langue, engendre la suffoque d’un coeur qui sature de salax. Le pyro gave la chair de l’éphémère. Déploie la saillance de la gorge pour recevoir les offrandes aqueuses des bécots. Ongles empoignent sur le seuil de l’extase l’avant-bras de l’incube intoxiqué par la fragrance de sa nuque. L’autre main absorbe les crins recouverts pour encourager la clôture de dévore entre ses guigues.
La figure ramenée à elle serpente ensuite sur la surface de ses monts, saccage la lippe inférieure pour alimenter l’ignis. Derrière les portes, les moutons grivois agitent des mots. Et bientôt, les protestations atteignent l’antre voisine. « Embrasse-moi. » Le tumulte gangrène la nervosité des fleurons d'aphrodisiaque. Les lèvres s'entrouvrent, s'alimentent sans s’adjoindre à l’inquiétude des tritons. Duetto s’endigue toutefois, plonge sur le dos pour l’enclore, les yeux braqués vers les sources des lamentations extérieures.
Anonyme incommodant du lupanar débouche de l’encadrement de la porte. N’augure rien de bon pour les créatures de stupre mais décoche à contrario chez l’ondine dépouillée au centre de ses convives une grimace coruscante. Les mots puis l’inspection des chairs voisines causent l'occurrence d’un sourire paillard. « Toutes les créatures d’Atalan ne sont pas comme toi. » Ode à l’aura du forban ; au charisme discordant. L’avant bras se dispose sur le poitrail de puterelle. Paume supporte le menton. L’affection façonne ses lippes du plus pur des excitants : forge pour un instant éphémère le plaisir flagrant et ostensible de renouer avec sa présence. Un souffle parade sur la langue quand elle sent venir glisser sur ses clavicules les commissures adjacentes. Souillures remontent jusqu’à la lisière de ses tympans. Le battant tortille quelques mots méditatifs, truffés du parfum de l’attraction. Regard baigné d’un désir inapaisé. « Non, elles ne sont pas toi. » Claque subitement la paume sur les cuisses pour sonner à regret la fin braséro.
Vagabondent les créatures pour récupérer les défroques dans leurs bras. Cervantes à vide, harponne le bras de l’un d’entre eux et regagne une dernière fois le vermillon. Baise sa bouche avec ardeur ; de celle que l’on offre aux entichés. Délaisse frustrée le candide pour pivoter, nue et d’aplomb, vers le corsaire consolidé dans son trône. « J’aurais préféré t’accueillir avec la même ferveur. Mais si tu préfères jacter. » Flirt sans naufrage, la langue est séduisante. Dextre récupère l’amphore à côté de lui. Verse le vermillon dans une coupe tendue à canaille dont elle décèle les chevrons. « L’animal farouche n’est plus le même à ce que je vois. »
S’approche encore l’amante enfiévrée des vermines. Charogne nudité se penche sur les sinuosités de son minois. Paraît sur le point de causer une fracture ; d’ondoyer sa bouche corrosive sur la sienne. Profondeur des billes s’immerge dans celles du forban. La tension ne plane qu’un instant quand elle énonce, souffle échoué contre ses commissures « Ma chemise... Molech... Tu es assis dessus. »  

La scène est un théâtre de bacchanales. Les corps emmêlés, peints dans la fièvre de l’instant. Les échines rosies, essoufflées. L’orgiaque vision ondule devant ses lucarnes fascinées. Des secondes passent avant les premiers mots qu’il prononce. La nudité des créatures payées et congédiées ne lui effleure pas la rétine. L’œil se fait harponner par la chair lascive qu’elle déboulonne devant lui. Sans retenue. Rien. Putain. Il pourrait fermer les paupières pour un sentiment de gêne, d’une pudeur mensongère face à celle qu’il a toujours mis à l’écart de toute escroquerie sentimentale. Le clébard déleste l’habit farouche pour l’usurpation d’une fanfaronnade en écoutant les propos qu’elle lui sert. Flatterie heureuse de l’égo mâle. « T’aurais dû m’interpeller, j’serais venu. Plutôt que t’emmerder avec tes deux poupées. » La verve est rieuse, enjôleuse. L’animal a le bagou au bout des babines. Il n’a que les mots avec elle, des phrases maladroites, jamais les gestes. Toujours la retenue. Une séduction crasse qui aboutie au néant depuis des années qu’ils se connaissent. La jalousie bataille dans les entrailles, dans le regard, face à l’échange galoche sur les lippes du zigue nocturne. Ce geste qu’on ne partage qu’aux promis, qu’aux adorés – le loup geint, honteux, épris, devant le baiser fougueux qu’on dispense devant lui, et pas pour lui.

« Y doit pas t’rester un chouaye de bigaille pour m’payer correct. J’fais pas profiter d’mes talents au rabais, alors on va juste bavarder. » Il s’enveloppe dans le costume de la pute. Se cache derrière des paroles gribouillées d’ironie grivoise pour ne pas avouer le big-bang provoqué par la proposition. L’corsaire reste à sa place, ne dit plus rien, scelle les mots qu’il ne trouve pas. Vocabulaire manquant. La gnôle est acceptée en présent pour leurs retrouvailles. L’ambroisie des diables. Bistouille lestée dans la trachée, ravigote la sécheresse qu’il s’était improvisée depuis le début de soirée.

La bobine laisse voguer la surprise à la demande du vêtement qu’il emprisonne. Chemise qu’il se surprend à garder en otage quelques instants, dans sa paume rugueuse. Chiffon imprégné de son odeur, de ces fragrances qu’il n’a pas oubliées, qui restent les mêmes après toutes ces années. De ces nuits adolescentes passées le nez dans son cou. Les échines blessées et fatiguées emmêlées d’une simple amitié. La revoir lui décroche une douleur dans le poitrail. Six années sur le cadran de leur vie. Six années depuis l’adieu et la promesse chuchotée de se revoir. Les flots ont conduit vers d’autres rivages. Molech l’a égaré dans le vaste monde, aux bras d’inconnus, loin des remous qui hantaient ses pensées. Des heurts sentimentaux qu’il n’a jamais avoués, n’a jamais su interpréter. Des formules restées cousues dans les alcôves du cœur de ronces. Il semble se réveiller, soudainement, reprendre pied dans la réalité, se souvenir de ce qu’elle lui a demandé. Le tissu est tendu, secoué comme un étendard impropre. « Enfile-la c’te foutue guenille. Et grouille-toi, bordel » Brutalité de la demande. Il prend garde à ne pas la toucher, à n’avoir aucun contact physique avec elle. Reine-sirène. S’y perdrait s'il cédait. S’enivrerait. Ce n’est qu’un jeu, depuis des années. Une rigolade entretenue, elle se moquerait s'il avouait. Les mots se taisent. « J’la connais par cœur ta couenne, j’ai assez léché tes plaies. T’as pas besoin d’te pavaner. » Molech se montre amer. Claque la langue contre le palais. Il se souvient des blessures partagées. Des euphories guerrières en duo. Les félins se soignaient mutuellement, pansaient les douleurs dans le rire de leur victoire. De leurs années, il reste des cicatrices. Des souvenirs imprégnés sur l’épiderme, une histoire commune qui fait leur mémoire.

« T’es toujours pas en taule, j’suis impressionné. Y paraît que t'as fait de belles conneries sur ton dernier rafiot. » Des rumeurs courent sur le dos de tous les forbans. Des traînées de paroles qu’on prend pour vrai alors que le mensonge a tricoté toute une odyssée. Des farandoles d’actions et d’atrocités. Des tornades de meurtrissures. « Ta tête est mise à prix quelque part ? Que j’me tâte à récolter la prime. » Mercenaire pirate. Il ignore si elle vogue encore pour l’Empire, pour les ordres de la capitale.

Même au tintement d’une esclandre, carcasse chimérique ne se farde les os devant nul quidam ; dépouille autant qu’elle exhibe sans jamais hésiter. Déploie l’entrecuisse sans enrayer la langue sur sa carne attisée. Se sait, ondine, reluquée dans l’encadrement de la porte ; éréthisme décuplé sous les agates d’un voyeur. Dépravation sitôt chahutée par le fantôme décelé. Souffle sous entrave félicité. Molech, spectrum du passé.
L’usagère lupanar est fine gueule, choisit ses victuailles avec goût. Miches sculptées dans les abysses des artères sordides de Tergaron. Et pourtant, s'agitent les mots sur la valeur de fringale. Glisse alors flatterie à l’égo du forban sous assemblage de mots charmants. En inhale la véracité derrière les rituels de leur flirt perpétuel : valdingue étouffée des battements de son coeur au timbre enjôleur de l’égrillard. « Tu t'sens pas d’attaque pour gaspiller tes talents avec moi mais tu n’as aucun tracas à les lorgner, mes aptitudes. » Figure licencieuse délaisse le sarcasme railleur. Libère des mots mordants en même temps qu’elle accompagne l’amphore.

Maraudeuse déambule sans plastron, sans ses frusques bousillées par la corrosion. Six ans sans guerroyer côte à côte, âmes jumelles dans la bagarre, à distance l’une de l’autre. Et le voilà qui se fixe dans sa tanière éphémère, noyé au milieu des ombres dansantes des chandelles ; imprégné du parfum de stupre qui ruisselle du bordel.
S’écorche le rythme d’un cardiaque entiché au tambour de ses cils. Chemise mentionnée se récupère avec la paresse d’une tortuga ; l’oeil s'enivre d’une bobine qu’elle pourrait aisément avouer avoir ruminée (pléthore de fois). N’en défait cependant aucun mot. « C’que tu peux être impatient. Quand d’autres rêvent de me dépouiller, toi tu me préfères masquée derrière mes nippes salopées. Préviens-moi quand t'auras cessé de me résister. » Gueule détache nouvelle diablerie. Le corps ne reste pas indéfiniment dévêtu, récupère la chemise longue pour y engloutir avec paresse les crins et les cimes. Les lacets de la chemise se referment lentement sur la poitrine. « Avoue-le, tu aimais ça, me rafistoler. Tu n’as jamais été infaillible non plus. J’ai toujours adoré juguler tes hémorragies. » Évocation nostalgique des bains au cruor bandits ; invocation à demi-mots des spectres des adversaires annihilés. N’a jamais été plus en phase avec sa rapière qu’aux côtés du monstre marin échoué sous ses sphères. « La taule ? » rire martele l’enclos de la plus terrible des mélodies. « Tu crois que les murs d’une geôle pourraient m'endurer plus d'une neuille ? Pour ce qui est des on-dit, ils sont tous faux. » Taquine la langue au goût étranger du fer rouillé. Rumeurs véridiques d’un rafiot qui ne connaît que sa mauvaise humeur. L’ennui corrode son cervelet depuis trop longtemps. Visite Molech, premier sursaut de fripouille depuis des lustres. Pantalon récupéré sur les draps, racaille s’immerge à l’intérieur. « Si c’est pour foutre ma tête sur l'billot que t’es là, tu vas être dépité d’apprendre qu’y’a pas de corsaire plus docile que moi dans toutes les eaux noires de Vassion. » dame se laisse choir sur le lit pour enfiler une première botte. « J’doute que tu sois désespéré au point de frapper à toutes les portes du bordel pour venir collecter ma carcasse pour l’empire ? J’vaux à mon avis pas mieux sur le papier qu’un pourboire qu’on file aux catins pour une bonne baise. Alors pourquoi t’es là Molech ? » Sentinelle atone Orbsun pris au piège dans ce vaudeville scrute sans en avoir l'omniscience son quelconque ordinaire. Tanière de débauche ou plutôt, l’antre de son vivant : bercail de l'engeance des maelstrom, grivois pied-à-terre où se déversent jour après jour ses dernières rentes. Ecumeuse débarquée d’un vaisseau qui tarde à regagner les flux. Rouille mordorée dans ses billes, le sanglant, le saigneux lointain des batailles avorte son âme. Se dandine alors la barbare carnassière sur les marionnettes pour chasser les affreusetés du néant. L’ennui qui la guide à l’apathie, l’apathie à la morosité et la morosité à l’appétence désertion (mot de trop, équivoque de danger). « Tu comptes me faire languir encore combien de temps avant de t’mettre à parler de c’machin là ? Quel galion t’as submergé pour l’saint-empire pour mériter c'galon? Hein, mon capitaine ? »