can't catch me now | ashara

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nithya's house.

tw : description de meurtre-

Cela faisait plusieurs jours qu'elle respirait l'air putride du pêcher au sien de la cité de Dreadmire. La ville aurait pourtant dû être le bastion de la foi au plus grand des dieux, le seul qui compte vraiment dans l'équation de la vie et de la mort et pourtant, celle-ci se complaisait en la croyance en d'autres, abritaient des traîtres Fiel en un coven impie. Les pèlerins la dégoûtaient presque plus que les membres de cette congrégation ; faibles petites fourmis suppliant pour un peu du pouvoir des dieux, incapable de s'en saisir même si on leur tendait. Leur faiblesse était un poison que ses mains tremblaient d'éradiquer. Elle pourrait faire une belle incision, faire couler assez de sang pour que les cendres deviennent une ode à Jimfir, pour leur faire découvrir la véritable vérité de ce bas-monde et être consumé par les flammes de la justice divine. Comme la croisade serait courte, les flammes devenant chevaliers de la Foi, les cendres symbole de reconquête. Les yeux du colosse de son Père l'observaient en un challenge silencieux, douce promesse murmurée au vent, dans l'ombre de sa grandeur. La Fille s'agenouille face à sa puissance, le voile entourant sa tête manquant d'être repoussée par la puissante brise annonciatrice des ténèbres à venir. La Lame divine ferme les yeux pendant un bref instant, ses mains s'enfonçant dans la terre calcinée et pourtant sacrée de Dreadmire. Ses paroles viennent murmurer les prières qu'elle avait prononcées alors enfant au dieu de la Mort : donne-moi la force, donne moi le pouvoir de tout brûler sur mon passage.

Ashara adorait traquer, elle aimait déceler les traces d'un parfum familier, suivre la personne dans l'ombre devenant une maîtresse des ténèbres l'environnant. Il y avait quelque chose de grisant à observer quelqu'un sans qu'il ne le remarque, à voir sa victime tomber dans une lente paranoïa, certaine d'être vu sans jamais voir celui qui l'observe. Comme un chat, elle aimait jouer avec les souris qu'elle arrivait à avoir entre ses griffes, se réjouissait de leurs petits cris d'effroi et de leur course désespérée. Elle adorait savoir qu'elle serait le dernier visage qu'ils verraient. Nithya avait été particulièrement facile à trouver comme si leur Père l'avait conduit à elle, comme si le fil qui existait encore entre elles l'avaient amenée en ce lieu de perdition comme pour la forcer à faire face à l'horrible trahison. Elle était devenue une pélerin, était entrée dans le sanctuaire de l'impie coven, s'était cachée derrière les colonnes dorées pour observer sa future victime, sa sœur pécheresse. Les cendres, le sang et le sel, voilà ce qui tournaient dans sa bouche quand elle la regardait pratiquer son art pour guérir les souris qui se ruaient dans ce trou à rat. Voilà ce qu'elle faisait du talent que leur Père lui avait donné, le gaspillant en quelques sortilèges réparateurs, elle qui aurait dû être la Destructrice de ce lieu. Elle avait eu envie de lui couper les mains pour l'empêcher de toucher ces misérables, lui ôter la langue afin qu'elle arrête de gaspiller la salive divine qui lui permettait de prononcer les sortilèges.

Les sortilèges de sa demeure avaient été faciles à écraser, Ashara connaissait les moindres recoins de l'âme de sa sœur perdue, pouvait déceler le moindre piège que celle-ci lui aurait tendu. L'imiter avait toujours été son jeu favori, cela lui était encore plus facile qu'avant, elle avait appris auprès de son fantôme. Si Nithya avait, un jour, été destinée à être l'amante maudite de leur Dieu, Ashara avait été destiné à en être les ténèbres grouillantes. Elle avait observé la demeure, remarquant la faiblesse de celle-ci, les tissus qui pourraient finir en cendre si facilement et surtout l'enfant que la maison gardait jalousement. La louve était presque tentée par la brebis qui se tenait là en face d'elle, mais sa faim était ailleurs bien qu'elle se réjouissait intérieurement de ce qu'elle pourrait faire pour la faire revenir parmi les siens. Si ce n'était pas une motivation suffisante, elle lui trancherait la gorge, les enfants étaient toujours les meilleures offrandes pour son Père. Les pas à l'extérieur l'alerte, son dos vient se coller au mur tout en se rapprochant silencieusement de la porte. La traître semble marquer une hésitation et Ashara sourit dans l'obscurité, contente de la voir s'approcher, ne pas reculer comme la lâche qu'elle semble être.

Ses mains viennent effleurer la poignée de son épée courte, la chaleur se diffusant dans la lame se rougissant face à l'impact de sa magie. La porte s'ouvre, la danse commence. Pour imiter un pas, il faut bien connaître la personne ; savoir sa cadence, imiter le bruissement de ses chaussures sur le sol et savoir quel poids il met dans ses pieds. Devenir une ombre avait toujours été plus facile pour Ashara. Elle était destinée à devenir la maîtresse de ce domaine. Pourtant le faire en cet instant était déstabilisant, ses oreilles vibraient d'une chanson moqueuse. À jamais l'imitatrice et jamais l'imitée, la poupée que l'on prend pour jouer avec Nithya avant de la délaisser quand la véritable Nithya revient. Le second choix toujours et à jamais. La douleur de cette constatation lui fait serrer les poings si forts qu'elle est sûre que si ses ongles n'avaient pas brûlé des années auparavant, elle aurait trouvé du sang dans ses paumes. La danse continue, musique silencieuse alors que les portes s'ouvrent et se ferment à leur passage, que les encens brûlent vivement comme attisés par la colère qui l'anime. Elle sent les battements de son cœur s'affoler dans sa poitrine, ses mains trembler face à l'adrénaline alors que la lame est prête à frapper. Elle peut voir la veine pulser sous la vie mortifère de la pécheresse, peut presque sentir son sang sur ses lèvres et entendre son râle alors qu'elle coupe cette fameuse artère la noyant dans son propre liquide vermeil.

La lame est presque sur la peau olive de la sorcière, la douceur de celle-ci se reflétant sur le métal et pourtant, la main de la Justicière tremble. Prise de nausée, elle fait un pas en arrière faisant mouvoir les tissus de son voile, brisant le sort. Elle reprend vite contenance, rangeant l'épée Mortifère dans son fourreau, se dévoilant entièrement à celle qui ose encore l'appeler famille. Le monstre se mue de nouveau de colère, un être fait de chair et de haine qui sait que même sans la lame, elle peut tuer. Elle rit, Ashara face à l'audace de sa future victime, rit face au dégoût que sa faiblesse lui inspire puis se calme en regardant calmement sa brebis. Elle marche, observe d'un air moqueur l'illusion que la fille prodigue s'est construire ici, caresse du bout des doigts certaines de ses possessions qu'elle a envie de détruire. Que pensait-elle en venant se terrer ici ? Que jamais leur Père ne leur aurait appris la triche ? Qu'elle pourrait ainsi imiter la Mort sans que celle-ci ne vienne la rattraper ? Nithya était naïve, elle était faible pour avoir ainsi été convaincue par ce coven, faible d'avoir quitté leur Père. La volonté d'Ashara était faite d'acier, son amour pour le divin palpable jusque dans son être. Elle était la justice que venait servir son Père à son ancienne fille mais cela ne l'empêchait pas de vouloir jouer avec sa future victime un peu. Elle voulait comprendre comme Icare était tombé de si haut. Elle se tourne finalement vers Nithya « N'est-ce pas ce que tu es mere dil kee bahan, un fantôme ? » Ashara vient contourner le bassin, lançant un regard méprisant à ce qui l'entoure, serpent crachant son venin  « Dis-moi, Nithya, comment était le royaume de notre Père ? »

traduction:

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nithya's house.

tw: : description de meurtre-

Le jeu à deux pouvait enfin commencer, les hostilités étaient lancées et la guerre dévastatrice pouvait commencer. Les armes sont des vérités, les peurs les plus profondes de l'une et de l'autre crachée par les êtres aimés. Nithya son amie de toujours, la sœur qu'elle ne pensait jamais plus avoir, l'écho de chacun de ses pas. Pourtant, elle ne voyait en elle qu'un être infime de ce que sa sœur avait un jour été. La mort ne l'avait pas rendue plus grande ou plus puissante, juste d'un pathétique qui lui semblait risible. Cela faisait des jours qu'elle ne l'avait pas vu brandir les flammes de leur Père dont elle semblait avoir perdu la bénédiction. Comme la grande avatar était tombée, celle que tout le monde, un jour, redoutait et aujourd'hui, une mère terrée dans les confins d'une cité maudite qui vénérait le seul être auquel elle avait tourné le dos. L'ironie était cruelle et douce à la fois. Nithya avait toujours été trop rêveuse pour son propre bien, avait toujours eu cette idée de grande puissance à cause d'une prophétie prononcée par une femme à moitié folle. Ashara avait toujours été son contraire ; une lignée oubliable qui prenait toujours plus, choisissant de construire son propre chemin plutôt qu'il ne lui tombe sur la tête. Créatrice de sa destinée plutôt que d'en être une victime.

Elle pouvait voir à travers les attaques de la traîtresse. L'eau qui tremblait dans le bassin semblait être soudain annonciatrice de la tempête à venir « Est-ce censé m'effrayer ? C'était un jour notre rêve à moins que tu l'aies oublié lui aussi.» Elle se souvenait être allée sur ces champs où elle était censée être tombée. Elle avait enfoncé sa main dans les cendres qui auraient dû être les siennes. Les jours ayant suivi la mort de la sorcière, elle avait cru que jamais les larmes n'arrêteraient de tomber, que toutes les cicatrices de son âme s'était ouvertes à nouveau pour la laisser mourir, le sang noir coulant de ses veines. Savoir qu'elle était dans le royaume de leur Père avait eu quelque chose de réconfortant, elle avait seulement rêvé qu'elle puisse y aller en même temps que celle qui l'y avait mené la première fois. Elle regrettait sa faiblesse aujourd'hui, le goût amer qu'elle avait dans sa bouche en la regardant bien en vie ne cessait d'envahir sa bouche. Comment avait-elle pu tourner le dos aussi facilement à sa famille ? La faiblesse dans sa Foi et dans son cœur, avait-elle toujours été présente ? Elle avait peut-être été aveuglée par l'amour qu'elle lui avait un jour porté, peut-être qu'elle avait délibérément ignoré les signes pour rester auprès d'elle. L'architecte de son être se révélait être une idole faussée, une fausse déesse sous les traits d'une traîtresse et sa simple vue lui donnait la nausée. La voix dont elle avait toujours entendu les plus précieuses mélodies composées pour son être sonnait désormais comme un orchestre désorganisé, les notes stridentes de leur amitié la faisant presque tressaillir. L'ombre se demandait ce qu'elle avait tant cherché à imiter, combien de son être lui ressemblait et si cela menaçait l'intégrité de ses ténèbres. Nithya était une épreuve que son Père lui avait envoyée, un moyen pour lui de la rendre plus forte. Éradique la racine, semblait-il lui murmurer, et tu seras libre.


« Je n'ai jamais visé le trône, Nithya.» Elle se rapprocha de l'être qui ressemblait tant au sien, le coeur semblant faire une course contre un ennemi invisible « Toi par contre, crois-tu que le Tribunal te fera parvenir jusqu'à la salle du trône ? Les parjures n'ont pas leur place au sein du Saint des saints.» Voilà là la véritable justice qu'elle attendait pour l'âme de ce qu'elle fut. Nithya osait encore parler du Dieu calciné et de son trône quand dans l'après-vie, elle sera condamnée aux tourments et au désespoir. Cela la fit sourire, un sourire qui lui déchirait le cœur. Il n'y aurait aucun plaisir à la tuer, c'était un geste mécanique, un moyen d'atteindre la puissance de son père sans vraiment y arriver. Le véritable plaisir, la réponse à ses prières se trouvait dans ce qui allait se passer ensuite. Elle aurait presque envie de tourner la lame contre son propre cœur le jour tant attendu pour assister à son audience. Elle se frayerait un chemin parmi les ombres, se mouverait contre les ténèbres du Tribunal pour entendre les Juges prononcer la sentence. Elio pouvait se suffire de voir s'éteindre ses yeux au creux de ses mains, mais Ashara espérait être présente lors de la véritable punition. Elle aurait presque pitié de Nithya, condamnée sans qu'elle ne semble en avoir conscience, à tomber dans l'oubli des âmes damnés, le corps fouetté par les harpies de leur Père et obligé de se souvenir des pires moments de sa vie encore et encore. Peut-être qu'ainsi elle ressentirait ce qu'elle leur avait fait subir, peut-être qu'ainsi, elle saurait ce que cela faisait devenir une ombre et de viser toujours la lumière sans jamais y parvenir. Ashara avait abandonné d'y arriver un jour, contente d'être devenue une créature faite d'obscurité et de sang, se repêtant des ombres qui l'accompagnait maintenant depuis toujours. Cependant, la douce Nithya ayant été promise à la grandeur allait tomber de haut. Icare féminin ayant voulu faire demi-tour alors que le soleil déjà lui brûlait les ailes.

Les attaques enfantines de Nithya la firent rire plus fort, le son résonnant dans l'habitacle vide. Elle voyait là les cris d'une petite souris se sachant condamnée. Elle s'approcha encore plus près de son ancienne sœur, avatar de rien à part du morceau brisé d'un rêve. Elle était maintenant si proche qu'elle pouvait sentir son souffle contre son visage, pouvait voir le tumulte violet de ses yeux. Le poignard était entre eux, serment imprononçable, promesse vengeresse. Elle le leva entre elles, la lame reflétant le visage de la Juda et brilla face à l'astre lunaire. Elle la posa juste à côté de la jugulaire, un faux mouvement et elle pourrait l'enfoncer assez profondément pour que sa sœur se vide de son sang, le lotus deviendrait rouge de son sang et elle aurait alors accomplie sa mission divine. Cependant, elle n'était pas une parjure comme le monstre en face d'elle, la promesse résonnait dans son esprit de façon plus urgente alors qu'elle était si proche du but. Elle rengaîna la lame dans son étuit dans un mouvement rapide et fluide, mais la menace planait toujours dans l'air. Elle l'observa, inscrivant ses traits dans sa rétine et lui adressa un autre sourire en la désignant du doigt, manquant de l'effleurer au passage « Ta condamnation a été transmise à un autre et contrairement à toi, je tiens mes promesses. Il a hâte de t'envoyer auprès du Dieu que tu as renié. » En la condamnant au trépas, il l'avait choisie elle et elle espérait qu'elle le voit à travers ses lèvres. Elle existerait encore que son cadavre ne serait qu'un tas de cendre dans l'égoût du coin. Elle existerait dans ses bras alors qu'elle aurait quitté les vivants pour retrouver son châtiment.

Elle fit un pas en arrière et envoya la table valser, la vaisselle délicate brisée sur le sol comme l'image de leur amitié. Elle observa ses doigts calcinés, le sadisme se dessinant lentement sur son visage avant qu'elle ne tourne son attention sur la lune qui les observait toutes deux. Elle espérait que son Père riait aussi fort qu'elle à présent, qu'il apprécie de voir confrontée l'enfant qui l'avait un jour renié. Elle se tourna alors à nouveau vers sa soeur d'autrefois, le fantôme de ce qu'elles avaient été tangibles dans l'air entre elles. Puis ses lèvres se firent le reflet du sadisme latent et elle finit par lui dire d'une voix aussi glaciale que la brise qui menacait les flammes des bougies à cet instant « Je réserve ma lame pour l'enfant que tu protège en ce lieu, ce sera ta punition pour nous avoir abandonné ; me voir l'égorger devant tes yeux et toi être impuissante. Je veux que cette image hante tes yeux alors que tu quitte ce monde. » Elle s'approcha de la brune aux cheveux de jais, chaque pas un peu plus lourd que le précédent. Elle murmura alors le nom de l'enfant qu'elle avait entendue des jours plus tôt, le mot résonnant encore et encore comme un refrain sinistre à ses lèvres. Elle espérait que son père entendait cette condamnation « Reviens auprès de nous et j'épargnerais ton bâtard, peut-être même que Père l'acceptera parmi-nous.»

tw : perte d'un enfant, violences, menaces.
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Les prophéties rendaient les gens arrogants, trop sûrs de ne pas rendre des comptes sur les mots brumeux prononcés par une vieille sorcière sur le point de mourir. Nithya ne craignait pas le royaume des morts et du feu parce qu'elle pensait ne pas pouvoir être soumise aux règles. Cela rendait Ashara furieuse, car tous étaient promis au plus grand des jugements et si Nithya était la réincarnation de l'amante du plus grand des dieux, elle était sûre qu'elle serait traitée avec encore plus de sévérité. Pourtant, ce n'est pas le nom de leur dieu que prononce la femme aux cheveux de jais devant elle, non, c'est celui d'Elio. Entendre ces syllabes prononcées par ce fantôme rendait leur union et leur promesse comme enfantines, de moindre importance. Malgré son apparente froideur, la syllabe ne pouvait cacher l'histoire qui avait exister entre celle qu'elle était prête à imiter pour Elio et celui pour qui elle désespérait d'exister. La marionnette sent le feu ravageur se déverser sur son corps froid, ses doigts devenir de la cendre chaude et elle dévie son regard des étoiles pour regarder la traître « Mon sacrifice n'en sera pas moins récompensé par notre Père et au défaut, je saurais me faire vénérer dans les draps de celui que tu as abandonné pour fêter ton départ. » L'attaque était basse, mais elle voulait qu'elle sache qu'elle avait été remplacée. Douce ironie que celle dont elle était l'ombre avait finalement été condamnée dans les ténèbres de sa chambre. Condamnée à regarder dans l'Autre Vie ce qu'Elio et Ashara deviendraient une fois que le dernier obstacle à une relation sincère serait évincé. Ce sera son nom à elle qu'il criera aux étoiles, elle qui existera au creux de sa poitrine, elle qui jamais ne l'abandonnera comme son ancienne amante. Elle aurait pu presque en rire si elle n'avait pas peur que ce ne soit que des rêves murmurés aux astres sourds. L'espoir était un poison dont elle n'aimait pas reconnaître l'existence, c'était un virus qu'elle devait écraser de son pied. Aussi, elle garda le silence pour mieux observer son adversaire.

Les enfants. Douce illusion selon laquelle ils étaient forcément innocents. L'orphelinat lui avait montré à quel point les enfants pouvaient être retors, à quel point on devait soit les soumettre à la volonté du Dieu tout-puissant soit les emmener à son royaume mortifère. La mort prenait tout le monde ; les enfants, les adultes, les vieux. Il n'y avait aucune distinction, aussi sa lame avait toujours été dédiée aux traîtres et récalcitrants qu'on lui désignait, qu'ils soient enfants ou adultes. Les premières fois étaient toujours les plus difficiles, parce qu'elle avait dû se libérer des lois humaines pour répondre aux lois divines, se battre contre sa psyché malade des valeurs morales du commun des mortels pour mieux se soumettre à la mort. Les enfants étaient les sacrifices les plus puissants à Fimjir, la plus grande offrande que l'on pouvait mettre sur son autel. Elle ferait en sorte que l'enfant de la traîtresse ne souffre pas sous ses lames, que ce soit rapide afin qu'Ozalee ne soit pas punie cruellement des offenses de sa mère. Cela était un honneur d'être accompagnée dans le royaume mortifère de son grand-père par un membre de son coven le plus sacré. Elle ferait en sorte que le voyage soit agréable, elle illuminerait son chemin afin qu'il se fasse sans encombre.

Les mots avaient toujours eu peu d'importance aux yeux d'Ashara, ce n'était que des verbes et des adjectifs assemblés ensemble par une voix doucereuse d'où pouvait naître le mensonge. Les responsables de l'orphelinat l'avaient vite découvert, ils avaient pourtant tout essayé verbalement pour la faire souffrir ; les pires injures, les remarques assassines, les sous-entendus. Rien n'avait fonctionné. Probablement parce qu'Ashara n'avait jamais révélé à personne ce qu'elle avait été avant d'entrer dans l'orphelinat. Personne n'avait jamais rien sût sur ce double qu'elle avait brûlé dans les caniveaux, sur sa première offrande au Dieu de la Mort. Même Elio en ignorait même l'existence. Le nom de celui qu'elle avait caché dans les tréfonds de son cœur n'avait été chuchoté qu'une fois, lors d'une nuit d'hiver à celle qui se tenait en face d'elle. L'entendre en parler lui donnait la nausée. Comment avait-elle pu se laisser aller à tant de faiblesse ? Comment avait-elle pu croire en l'imposteur qui se tenait désormais devant elle ? Ce n'était pas une déesse, mais un animal qui se rendait compte qu'elle était acculé et qui se débattait vainement pour essayer de s'en tirer. Jamais ses mains ne l'avaient autant démangée. Elle pourrait en finir là maintenant, lui planter cette dague dans le cœur, aspirer l'essence de sa vie pour alimenter le monstre qui naissait dans sa poitrine à chaque fois qu'elle regardait celle qui prétendait être sa sœur. Sa sœur était morte, celle qui se tenait face à elle n'était qu'un reflet, un cadavre ayant perdu son âme perfide et essayant d'imiter l'inimitable, car sa sœur n'aurait jamais osé prononcer les mots qu'elle avait osé lui dire. Sa sœur n'aurait jamais renié sa famille et surtout, sa sœur aurait déjà tuée cette pâle imitatrice.

Elle pouvait voir à quel point ses menaces avaient fonctionné. Ses yeux étaient rivés vers les doigts de la sorcière qui rougeoyait sous le feu de sa fureur et elle en souria. Elle voulait que la plaie qu'elle venait de lui infliger soit si grande qu'elle en deviendrait paranoïaque les prochains jours, qu'elle surveillerait les ombres de sa maison avec appréhension. Elle continua de sourire alors même qu'on lui brisait la cheville et le bras, le bruit sonnant comme une mélodie particulièrement agréable à ses oreilles. Elle s'éleva dans le ciel, les mains de sa prétendue sœur enserrant sa gorge, révélant sa faiblesse, car alors même qu'elle aurait pu la tuer en cet instant, elle décida de la laisser tomber dans le bassin rempli d'eau, amortissant sa chute. Aucune flamme n'était venue lui lécher la peau, rien de la puissance de sa véritable sœur à part quelques braises risibles. Elle avait envie de vomir. Elle resta une minute dans l'eau, fermant les yeux. Elle pouvait sentir la chaleur de son propre corps venir remplir de fumée la pièce, la bénédiction du Dieu des incendies venir emplir son corps de sa puissance. Bientôt, la pièce se retrouva sous une fumée épaisse où l'on ne pouvait discerner que certaines formes. Ashara se releva du bassin désormais vide de toute eau, ses pas silencieux. Nithya avait toujours été la force brute tandis qu'elle avait toujours été le serpent se cachant dans les fougères pour mieux attaquer. Elle trouva un portrait d'Ozalee qu'elle réduisit en cendres, augmentant la fumée faisant brûler ses poumons à chaque respiration. Elle prit une poignée des cendres du portrait maudit, elles étaient encore rouges et vibrantes de son pouvoir.

Elle finit par se mettre à quelques mètres de Nithya. Elle pouvait reconnaître la forme de son corps entre mille, pouvait en dessiner chaque contour avec précision. Elle se mit derrière elle, brume parmi la brume, ombre qui se détachait enfin de sa maîtresse. Le sortilège est chuchoté, transporté par la brume qui s'enroule autour de Nithya. Elle n'avait pas la conscience de cette traîtresse et sa colère était telle qu'elle avait peu de cas pour les sentiments de celle qui prétendait être sa sœur. Sa sœur était morte. La phrase était comme un mantra dans sa tête alors que la sorcière et fausse déesse se contorsionnait dans la fumée face à la douleur dont elle était la marionnette. Le sort avait toujours été son favoris, celui qu'elle avait appris le plus rapidement à l'orphelinat, peut-être parce qu'on lui avait infligé tant de fois qu'il était devenu une comptine familière. Elle s'approcha de la brune qui était tombée à terre face à la douleur et caressa ses cheveux presque tendrement. Un dernier adieu à l'enveloppe corporelle de Nithya, un dernier au revoir à la carcasse qui essayait d'imiter sa sœur en vain. Elle s'approcha de son oreille et lui murmura ces quelques mots « Pense au choix que tu as fait pour ta fille aujourd'hui. Menteur et mère de pacotille qui préfère envoyer sa progéniture au bûcher plutôt que de revenir au bercail.» La pitié et le dédain s'enlacent dans les mots qui sortent de sa bouche.

Ashara fait un pas en arrière puis deux et le sort qui la protège des yeux vient accaparer son corps et la rendre invisible. Elle redevient une ombre non sans prononcer un adieu presque inaudible, le seul qui est véritablement vibrant d'émotions. Elle avait voulu voir ce qu'était devenue Nithya, expliquer sa trahison, mais n'avait trouvé aucune de ces réponses. Elle devait être tuée afin que la véritable Nithya reprenne sa place au sein du royaume des Morts, que son âme soit enfin libérée de cet habitacle qui trahit sa mémoire. Une part d'elle aurait voulu ne jamais la voir, aurait préféré continuer à espérer qu'elle ait atteint le royaume de leur père, mais elle avait voulu détruire cet espoir dans l'œuf. Il n'existait de Nithya plus que des cendres et ce furent ses dernières pensées alors qu'elle quittait la maison enfumée de ses souvenirs brisés et espoirs envolés.

tw : violences, menaces, torture.
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