Car le Seigneur châtie celui qu'il aime ft. Sinazel

Les larmes coulaient sur les joues du membre du Coven. Sanglots trop longtemps retenus qui désormais coulaient librement comme une libération. Avec douceur, Ewart lui tendit un mouchoir de lin teint de rouge. Ce n'était pas un des siens personnels, s'il se mettait à les distribuer à chaque fois que quelqu'un venait s'épandre dans ses quartiers il ferait la fortune des drapiers de Junfark, avec ses propres deniers. Non, ceux-là ils venaient des chutes de tissus des couturier.es du Coven. A y repenser, ce devait être un des restes des rideaux de l'aile ouest.

La main tremblante vient se saisir avec reconnaissance du bout de tissu pour ensuite le porter à son nez et témoigner d'une belle carrière de trompette qui ne verrait malheureusement jamais le jour. Ewart restait silencieux et patient, un regard bienveillant posé sur la brebis qui avait pris place en face de lui. Il attendait que le fidèle en ait fini avec ses reniflements et hoquets. Il en profita pour remplir à nouveau leurs verres de l'eau fraîche citronnée et aux fleurs de sureau, une douceur fort appréciable dans la chaleur étouffante de Junfark. En particulier lorsqu'on venait de vider une bonne partie de ses réserves d'eau en larmes et en morve. Cela avait été une des boissons préférée de Rhys. Et le Pénitent avait gardé l'habitude d'en faire préparer régulièrement.

Ewart avait arrêté depuis longtemps de compter les âmes en peines qui venaient s'alléger de leur fardeau silencieusement et dans les larmes dans ses quartiers. Cela faisait partie du rôle, de recevoir et faire couler les larmes. Il avait appris que cela faisait partie du rôle. Et Ewart considérait ces larmes de soulagement comme une victoire, une preuve que les doutes pouvaient être balayés et la foi s'en retrouver plus puissante encore. Bien sûr parfois, une oreille bienveillante, une part de gâteau au gingembre et un mouchoir ne suffisait pas.

Encens et prières. Elles aidaient, bien sûr, mais Ewart trouvait que le plus souvent une bonne infusion chaude, ou une boisson fraîche selon l'heure de la journée, accompagnée d'une assiette de gâteaux aidait plus qu'un cadre pompeux et étouffant. bien sûr, un cadre formel et rigide avait son utilité et son temps. Mais le Pénitent méprisaient ceux qui ne savaient manier que le bâton et le fouet dans une attitude pompeuse.

Les larmes finirent par sécher. Ewart fit signe à son invité de garder le mouchoir, il lui reviendrait après avoir été lavé. Ou pas du tout. Les deux options lui convenaient parfaitement bien. Il accompagna encore leur discussion de mots rassurants, de conseils de textes saints dans lesquels trouver le réconfort et le rappel de l'Amour Absolu de leur Père. Le temps que le verre soit vidé, puis Ewart guida le fidèle jusqu'à sa porte. En lui rappelant qu'elle lui était toujours ouverte. Comme à tous les membres du Coven.

Son expression de bienveillance et de douceur se fissura cependant quant il vit qui attendait patiemment sur la banquette qu'il avait fait mettre dans le couloir. En cet instant il eut la furieuse envie d'y mettre le feu. Il se contient, personne n'apprécierait un début d'incendie dans cette partie du Coven. Pas sans avoir averti auparavant. Son regard était froid tandis qu'il fixait la jeune femme en face de lui, il finit cependant à prendre la parole. A regret, il aurait préféré lui fermer sa porte. Mais bon, c'eut été contraire à la mission que leur Père lui avait confié.

D'un geste dénué de chaleur il fit signe à l'Oracle, quelle aberration, d'entrer. Quoi qu'elle ait à lui dire, et quoi qu'il puisse lui répondre en retour, Ewart doutait que ce furent des mots pour les oreilles indiscrètes. Il ferma la porte sèchement derrière elle, en pensant à l'encens purificateur qu'il ferait brûler durant cinq bonnes heures après son départ. Qui ne pourrait arriver trop tôt.

-Sinazel, le nom semblait presque lui écorcher la bouche. Que me vaut ta visite ? Il est rare que tu viennes me voir.

Et il appréciait énormément cet état de fait. Ne pas la voir lui permettait d'oublier son existence et en conséquence la rendait franchement plus supportable. Fichue tête de mule d'Helna, elle s'opposait férocement à l'écouter. Pourtant il savait très bien avoir raison.