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Dawn & Keryan
« Darkness cannot drive out darkness: only light can do that »
- Je vous jure messire, c’est la vérité !
- Il m’a appelé messire ?, demanda Keryan interloqué. Il avait subitement relevé la tête, quitté ses ongles -qu’il étudiait depuis un long moment, du regard pour interroger le protecteur qui se trouvait à sa droite. Ce-dernier, acquis à la cause du fiel depuis plusieurs années, ne répondit pas et se contenta d’un haussement d’épaules. Keryan manifesta son agacement au travers d’un roulement d’yeux et d’une inspiration bruyante, avant de sonder en silence l’autre protecteur, à sa gauche celui-ci. Lui aussi suivait le régent d’Aldmerys depuis bien longtemps et son âge avancé se lisait sur les traits burinés de son visage. Dans un premier temps, il pinça les lèvres en signe d’acquiescement face à ce constat mais, contrairement à son homologue, il ne resta pas longtemps muet.
- Il t’a appelé messire. C’est…un signe de respect…je crois.
- Tu crois ?
- J’en sais foutrement rien…messire.
- Messire, je…, commença l’homme qui était agenouillé en contrebas du trône. Sa voix était chevrotante, son corps était agité de tremblements qu’il ne parvenait guère à maitriser et ses mains trituraient nerveusement la coiffe en tissu qui lui servait de couvre-chef. C’était à peine s’il osait relever la tête, cesser de fixer la mosaïque qui recouvrait le sol pour croiser le regard de celui à qui il s’adressait. Il était terrifié et les mots se bousculèrent un temps dans sa bouche pâteuse avant que, d’un mot et d’un vulgaire revers de la main, Keryan ne le fasse taire pour de bon. Un banal sortilège de paralysie qui apaisa le fiel un instant, car le corps de l’homme était à présent immobile et ses genoux tremblants avaient enfin cesser de frotter bruyamment sur le sol. Keryan laissa échapper un soupire exagéré, soulagé de pouvoir accéder à ce court instant de répit. Finalement, après une vingtaine de battements de cœur, il libéra l’homme du sort.
- La vérité, dis-tu ? Pourtant, au moment où nous parlons, deux de mes hommes sont entre la vie et la mort. L’un d’eux est amputé d’un membre. Membre que tu lui a arraché, en l’attaquant lâchement. Je ne te crois pas, Aldric. Tu sais ce que je crois ? Je crois que tu as un problème avec l’autorité. Je crois que certains d’entre vous se sont trop longtemps engraissés sous le règne de Rhadamantus. Je crois que vous avez oublié ce que nous a fait l’Empereur et plus important encore, Aldric, je crois que tu es un traitre à ta propre race.
- Je…Tu ne vaux pas mieux que ton père ! C’est toi qui trahis les tiens ! Tu n’es qu’un putain d’imposteur ! Tue-moi, d’autres viendront.
- C’est ton fils ?, questionna simplement Evander, immobile, usant simplement de son index pour désigner un enfant de dix ans que deux gardes faisaient entrer à sa droite. Le dénommé Aldric avait employé un ton agressif, provocateur car il s’était sans doute senti pousser des ailes face à la fatalité. Il était coupable, il le savait. Coupable d’avoir attaqué les hommes du régent d’Aldmerys dans le but de libérer la forteresse, d’ouvrir les yeux à ses habitants sur le fiel qui en était à la tête. À tort, il avait pensé qu’il serait le seul et unique responsable de ses actes, qu’il mourrait en martyre et que son geste –plein de courage, en pousserait d’autre à se soulever. En voyant son enfant être trainer dans la pièce, le visage tuméfié, ses traits s’étaient décomposés. Si son regard avait été un portail sur le courage qui avait animé sa courte tirade, ce n’était plus le cas. Seule l’horreur et la peur s’y lisaient à présent, ce qui semblait ravir Keryan. Celui-ci quitta d’ailleurs son trône lorsque l’enfant fut jeté à ses pieds et vint s’accroupir à côté de lui, le saisissant par une poignée de cheveux. - Cause et conséquence. Tu attaques mes hommes et donc, moi. Tu dois être puni pour tes actes. Cause…, reprit le fiel en désignant l’homme à genoux, en pleurs, implorant la clémence. - Conséquence…, ajouta Keryan en tirant violemment le visage de l’enfant en arrière afin que les regards du père et du fils se croisent. Comme pour la magie qu’Evander s’apprêtait à utiliser, il fallait toujours faire un sacrifice. Le fiel se redressa de toute sa taille, tenant toujours la chevelure de l’enfant, les pieds de celui-ci touchant à peine le sol. Et alors que son bras gauche s’étendait et que des flammes infernales s’en échappaient pour aller brûler le père, le corps de l’enfant se consumait, flétrissait à vue d’œil. Lorsqu’Aldric ne fut plus qu’un tas de cendres, Keryan relâcha l’enfant –à peine vivant et, ce-dernier s’écroula mollement face contre terre. - Emmenez-le avec les autres. Videz-le de son sang et qu’on me prépare un bain., lança Keryan en retournant s’asseoir, tandis que ses hommes s’emparaient déjà du corps inerte pour le sortir de la salle du trône. Il s’affala dessus et d’un nouveau revers de la main, usa d’un sort mineur pour balayer les cendres qui salissaient la mosaïque. Bien des années auparavant, il avait vu son père agir de la sorte et transmettre, au plus âgé de ses frères, une leçon qu’il n’avait jamais oublié : pas de martyres. Aujourd’hui, ce n’était pasWeylin qui dirigeait Aldmerys, mais bien lui, le dernier d’une lignée que l’Empire avait voulu éteindre. Aujourd’hui, il prenait conscience de la politique qu’avait appliqué son père, car c’était lui le martyre.
- DAME BATES, ÉMISSAIRE DE L’EMPEREUR !, hurla le crieur près de la gigantesque double porte d’entrée qui s’entrouvrait déjà, à l’autre bout de la pièce. Keryan, perdu dans ses pensées, ne put s’empêcher de sursauter, surpris par l’éclat de voix du crieur.
- Bon sang ! Il faut vraiment qu’on trouve autre chose, ce type va finir par avoir ma peau !
- C’est un crieur, messire…Il crie…, se moqua le protecteur aux traits burinés.
- Ferme-la, Draïn. Laissez-nous.
Les protecteurs, postés de part et d’autre du trône s’exécutèrent, quittant la salle alors que la femme s’avançait dans l’allée. Keryan grimaça. Émissaire de l’Empereur. Un frisson désagréable parcouru son échine, le forçant à se redresser pour mieux s’installer. L’arrivée de cette réveillait un traumatisme profond, une plaie qui n’avait jamais vraiment guérie et le ramenait irrémédiablement au jour où toute sa famille avait été exterminée par les hommes de l’ancien Empereur. Anxieux, réprimant du mieux qu’il le pouvait cet étrange sentiment d’appréhension qui grandissait en lui, son regard se plissa comme pour mieux observer cet émissaire. Elle portait une armure légère sur laquelle était apposé cette marque, ce blason reconnaissable entre mille, celui des Hérauts de l’Aube : ceux qui étaient venu plusieurs plus d’un demi-siècle auparavant. Un peu plus petite que Keryan, sa démarche n’en était néanmoins pas moins déterminée, assurée. Les traits délicats et expressifs de son visage affichaient la même détermination et la clarté de sa peau semblait attirer à elle la lumière émise autant par les torches que les chandeliers. Le fiel prit son mal en patience et ne la quitta pas des yeux alors qu’elle traversait la salle, attendant simplement qu’elle soit à portée de voix pour lui adresser la parole.
- Tu es bien loin de chez toi, émissaire, lança finalement Keryan, un très fin sourire étirant ses lèvres, masquant sa nervosité. - J’espère que tu as fait bon voyage, les routes de l’Empire n’ont jamais été aussi peu sûres…surtout pour une cavalière, seule., continua-t-il d’une voix monocorde, faisant évidemment référence à la montée en puissance des Purgateurs. - Surprenant, même quand elles l’étaient, jamais un Empereur n’a mis les pieds ici. Et vous étiez beaucoup plus nombreux à l’époque…, ajouta Keryan, son sourire disparaissant et sa voix se faisant immédiatement plus grave alors que les souvenirs de cette matinée dramatique défilaient devant son regard sombre, rivé à l’émissaire.
- Il m’a appelé messire ?, demanda Keryan interloqué. Il avait subitement relevé la tête, quitté ses ongles -qu’il étudiait depuis un long moment, du regard pour interroger le protecteur qui se trouvait à sa droite. Ce-dernier, acquis à la cause du fiel depuis plusieurs années, ne répondit pas et se contenta d’un haussement d’épaules. Keryan manifesta son agacement au travers d’un roulement d’yeux et d’une inspiration bruyante, avant de sonder en silence l’autre protecteur, à sa gauche celui-ci. Lui aussi suivait le régent d’Aldmerys depuis bien longtemps et son âge avancé se lisait sur les traits burinés de son visage. Dans un premier temps, il pinça les lèvres en signe d’acquiescement face à ce constat mais, contrairement à son homologue, il ne resta pas longtemps muet.
- Il t’a appelé messire. C’est…un signe de respect…je crois.
- Tu crois ?
- J’en sais foutrement rien…messire.
- Messire, je…, commença l’homme qui était agenouillé en contrebas du trône. Sa voix était chevrotante, son corps était agité de tremblements qu’il ne parvenait guère à maitriser et ses mains trituraient nerveusement la coiffe en tissu qui lui servait de couvre-chef. C’était à peine s’il osait relever la tête, cesser de fixer la mosaïque qui recouvrait le sol pour croiser le regard de celui à qui il s’adressait. Il était terrifié et les mots se bousculèrent un temps dans sa bouche pâteuse avant que, d’un mot et d’un vulgaire revers de la main, Keryan ne le fasse taire pour de bon. Un banal sortilège de paralysie qui apaisa le fiel un instant, car le corps de l’homme était à présent immobile et ses genoux tremblants avaient enfin cesser de frotter bruyamment sur le sol. Keryan laissa échapper un soupire exagéré, soulagé de pouvoir accéder à ce court instant de répit. Finalement, après une vingtaine de battements de cœur, il libéra l’homme du sort.
- La vérité, dis-tu ? Pourtant, au moment où nous parlons, deux de mes hommes sont entre la vie et la mort. L’un d’eux est amputé d’un membre. Membre que tu lui a arraché, en l’attaquant lâchement. Je ne te crois pas, Aldric. Tu sais ce que je crois ? Je crois que tu as un problème avec l’autorité. Je crois que certains d’entre vous se sont trop longtemps engraissés sous le règne de Rhadamantus. Je crois que vous avez oublié ce que nous a fait l’Empereur et plus important encore, Aldric, je crois que tu es un traitre à ta propre race.
- Je…Tu ne vaux pas mieux que ton père ! C’est toi qui trahis les tiens ! Tu n’es qu’un putain d’imposteur ! Tue-moi, d’autres viendront.
- C’est ton fils ?, questionna simplement Evander, immobile, usant simplement de son index pour désigner un enfant de dix ans que deux gardes faisaient entrer à sa droite. Le dénommé Aldric avait employé un ton agressif, provocateur car il s’était sans doute senti pousser des ailes face à la fatalité. Il était coupable, il le savait. Coupable d’avoir attaqué les hommes du régent d’Aldmerys dans le but de libérer la forteresse, d’ouvrir les yeux à ses habitants sur le fiel qui en était à la tête. À tort, il avait pensé qu’il serait le seul et unique responsable de ses actes, qu’il mourrait en martyre et que son geste –plein de courage, en pousserait d’autre à se soulever. En voyant son enfant être trainer dans la pièce, le visage tuméfié, ses traits s’étaient décomposés. Si son regard avait été un portail sur le courage qui avait animé sa courte tirade, ce n’était plus le cas. Seule l’horreur et la peur s’y lisaient à présent, ce qui semblait ravir Keryan. Celui-ci quitta d’ailleurs son trône lorsque l’enfant fut jeté à ses pieds et vint s’accroupir à côté de lui, le saisissant par une poignée de cheveux. - Cause et conséquence. Tu attaques mes hommes et donc, moi. Tu dois être puni pour tes actes. Cause…, reprit le fiel en désignant l’homme à genoux, en pleurs, implorant la clémence. - Conséquence…, ajouta Keryan en tirant violemment le visage de l’enfant en arrière afin que les regards du père et du fils se croisent. Comme pour la magie qu’Evander s’apprêtait à utiliser, il fallait toujours faire un sacrifice. Le fiel se redressa de toute sa taille, tenant toujours la chevelure de l’enfant, les pieds de celui-ci touchant à peine le sol. Et alors que son bras gauche s’étendait et que des flammes infernales s’en échappaient pour aller brûler le père, le corps de l’enfant se consumait, flétrissait à vue d’œil. Lorsqu’Aldric ne fut plus qu’un tas de cendres, Keryan relâcha l’enfant –à peine vivant et, ce-dernier s’écroula mollement face contre terre. - Emmenez-le avec les autres. Videz-le de son sang et qu’on me prépare un bain., lança Keryan en retournant s’asseoir, tandis que ses hommes s’emparaient déjà du corps inerte pour le sortir de la salle du trône. Il s’affala dessus et d’un nouveau revers de la main, usa d’un sort mineur pour balayer les cendres qui salissaient la mosaïque. Bien des années auparavant, il avait vu son père agir de la sorte et transmettre, au plus âgé de ses frères, une leçon qu’il n’avait jamais oublié : pas de martyres. Aujourd’hui, ce n’était pas
- DAME BATES, ÉMISSAIRE DE L’EMPEREUR !, hurla le crieur près de la gigantesque double porte d’entrée qui s’entrouvrait déjà, à l’autre bout de la pièce. Keryan, perdu dans ses pensées, ne put s’empêcher de sursauter, surpris par l’éclat de voix du crieur.
- Bon sang ! Il faut vraiment qu’on trouve autre chose, ce type va finir par avoir ma peau !
- C’est un crieur, messire…Il crie…, se moqua le protecteur aux traits burinés.
- Ferme-la, Draïn. Laissez-nous.
Les protecteurs, postés de part et d’autre du trône s’exécutèrent, quittant la salle alors que la femme s’avançait dans l’allée. Keryan grimaça. Émissaire de l’Empereur. Un frisson désagréable parcouru son échine, le forçant à se redresser pour mieux s’installer. L’arrivée de cette réveillait un traumatisme profond, une plaie qui n’avait jamais vraiment guérie et le ramenait irrémédiablement au jour où toute sa famille avait été exterminée par les hommes de l’ancien Empereur. Anxieux, réprimant du mieux qu’il le pouvait cet étrange sentiment d’appréhension qui grandissait en lui, son regard se plissa comme pour mieux observer cet émissaire. Elle portait une armure légère sur laquelle était apposé cette marque, ce blason reconnaissable entre mille, celui des Hérauts de l’Aube : ceux qui étaient venu plusieurs plus d’un demi-siècle auparavant. Un peu plus petite que Keryan, sa démarche n’en était néanmoins pas moins déterminée, assurée. Les traits délicats et expressifs de son visage affichaient la même détermination et la clarté de sa peau semblait attirer à elle la lumière émise autant par les torches que les chandeliers. Le fiel prit son mal en patience et ne la quitta pas des yeux alors qu’elle traversait la salle, attendant simplement qu’elle soit à portée de voix pour lui adresser la parole.
- Tu es bien loin de chez toi, émissaire, lança finalement Keryan, un très fin sourire étirant ses lèvres, masquant sa nervosité. - J’espère que tu as fait bon voyage, les routes de l’Empire n’ont jamais été aussi peu sûres…surtout pour une cavalière, seule., continua-t-il d’une voix monocorde, faisant évidemment référence à la montée en puissance des Purgateurs. - Surprenant, même quand elles l’étaient, jamais un Empereur n’a mis les pieds ici. Et vous étiez beaucoup plus nombreux à l’époque…, ajouta Keryan, son sourire disparaissant et sa voix se faisant immédiatement plus grave alors que les souvenirs de cette matinée dramatique défilaient devant son regard sombre, rivé à l’émissaire.
(c) DΛNDELION
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